Tout a commencé en septembre 2009, lors de notre rentrée scolaire à HEC Montréal. Nos départs en échange, prévus pour janvier 2010, nous procurent une grande stimulation lors de ce semestre. Quel plaisir de se préparer pour un grand voyage de 6 mois dans un pays où la culture, la religion et la vision de la vie nous sont totalement inconnus !

Nous rendant compte de la chance que nous avons d’être accueillis par un pays tel que la Thaïlande pour une durée si longue, nous commençons à songer à des moyens d’apporter notre contribution à la population de cette terre d’accueil. Mais que faire, par où commencer ?

 

En naviguant sur les forums Internet et en discutant avec de nombreuses personnes présentes sur place, nous définissons ce qui sera le premier  jet de notre projet humanitaire : à Mae Sot, dans le Nord de la Thaïlande, à 6 km de la frontière avec la Birmanie ( maintenant appelée le Myanmar) se trouvent de nombreux réfugiés birmans et Karen (une ethnie vivant entre le Myanmar et la Thaïlande, revendiquant son indépendance et fortement réprimée par la junte militaire birmane au pouvoir depuis maintenant plus de 15 ans). Ainsi, n’ayant aucun statut légal en Thaïlande, ces familles survivent dans des camps de réfugiés tenus par des ONG ou dans les villages alentours. Les enfants ne bénéficient pas du système éducatif thaïlandais et ainsi, la formations de ces jeunes a lieu dans ce que l’on appelle des « migrant schools » (environ une soixantaine d’écoles de ce type dans la région) qui sont en réalité des centres d’apprentissage non reconnus officiellement, le plus souvent autogérés par la communauté birmane et karen, bénéficiant de l’aide internationale (fonds, matériel, bénévoles).

Ainsi, commence l’aventure ! Nous débutons par lever des fonds, en organisant un concert en Novembre 2009 (la fameuse Full Moon Party de Montréal !). Puis nous devenons officiels en créant en France l’Association loi 1901 dont le nom représente notre leitmotiv : « A.I.M.E. » (Association Internationale de Mobilisation pour l’Egalité).

Pendant les mois de Juin et Juillet 2010, notre projet se concrétise grâce à la présence sur place de 3 volontaires, tous étudiants à HEC Montréal. Nous travaillons dans deux écoles : le centre One Dream One World, qui s’occupe d’une trentaine de jeunes enfants âgés de 3 à 13 ans, et l’école B.H.S.O.H. qui prend en charge 270 enfants dont une centaine vivent dans l’école, offrant des cours de niveau primaires et secondaires (grade 1 à grade 12) et des cours postsecondaires (GED).

Nous donnons donc des cours d’anglais, les matins aux « petits » et les après-midis aux plus grands. Quelle surprise de découvrir les conditions dans lesquelles étudient ces enfants : quelques tables en bois, seuls les étudiants les plus âgés bénéficient de chaises, un cahier par enfant, pas de livres. Parfois même les étudiants nous demandent des stylos, il n’y a pas de marqueur pour écrire au tableau… Quelle énergie nécessaire pour donner des cours dans des salles bondées, bruyantes, ne pouvant communiquer dans la langue de ces étudiants ! Mais quel plaisir de les voir si motivés pour apprendre, si souriants, si vivants ! Et quelle satisfaction de les voir progresser en anglais, et crier après nous « Teacher, Teacher ! » Alors on improvise : chansons, mimes, dessins avec les plus jeunes ; pièces de théâtre, jeux, leçons de grammaire et exercices avec les plus âgés.

 

Parallèlement, nous rencontrons une étudiante Karen, Wah Lay, âgée de 19 ans, qui cherche à rentrer dans une université thaïlandaise, ce qui représente pour elle son seul espoir d’avoir un statut légal en Thaïlande (en effet, après l’acceptation dans une université thaïlandaise, les étudiants birmans reçoivent leur carte d’étudiant thaïlandaise, qui leur permettra d’étudier, de se déplacer librement en Thaïlande, et dans le futur d’avoir un visa de travail). Son passé extrêmement difficile, dont les détails ne seront pas mentionnés ici, lui donne une force de vivre extraordinaire. Nous l’accueillons donc chez nous, puis lors des dernières semaines c’est à son tour de nous recevoir dans sa modeste habitation dans un village proche de l’école. Nous l’appuyons dans ces démarches pour postuler à Mahidol University, à Bangkok, et devenir infirmière. Son anglais est excellent par rapport à de nombreux autres étudiants et  sa motivation solide. Nous décidons donc de lui trouver un sponsor, qui lui versera la somme de 75€ par mois, pour qu’elle puisse continuer à étudier sans avoir besoin de travailler illégalement. Cette somme lui permet de payer son loyer, sa nourriture et ses frais de scolarité. Nous espérons avec elle pour un futur porteur d’opportunités. Aux dernières nouvelles, Wah Lay à été acceptée dans une école post secondaire préparant pour les examens d’entrée à l’université.

Voilà, maintenant l’heure du départ pour nous. L’association « Action Enfants Birmans » (www.actionenfantsbirmans.org) qui prend en charge ces deux écoles, s’occupe de l’envoi continu de bénévoles et nous nous consacrons au sponsor de Wah Lay. Nous avons, entre beaucoup d’autres choses, compris la chance inouïe qu’est l’éducation. D’un point de vue très personnel, j’en ressors épanouie, plus forte qu’avant, je prend du recul sur les préoccupations matérielles que nous avons parfois trop en tête et je saisis la force de l’espoir et la simplicité du sourire. Jamais au grand jamais nous ne pourrons oublier le regard et le sourire de nos chers et tendres élèves de Mae Sot !