1. Présente-toi et ton parcours avant ta mission
Je m’appelle Jeanne, j’ai 21 ans, bientôt 22. Je suis étudiante et je viens de Grenoble. Avant ma mission j’étais en échange universitaire au Maroc à l’Université International de Rabat dans le domaine des Sciences Humaines et de la Science Politique.
2. Où es-tu partie ?
J’ai eu deux structures d’accueil car j’ai changé en cours de mission :
La première c’était Kailend Farm, une ferme agro-écologique au Togo, près de la ville Kpalimé. C’est une ferme qui produit et cultive des fruits, des légumes. Il y a aussi des chèvres, des lapins, des cochons, des poules, des abeilles et des poissons. L’objectif de la ferme est de cultiver des fruits et des légumes avec des techniques respectueuses de la nature sans pesticide, avec des engrais naturels (qui viennent des animaux). Il y a aussi des activités d’apiculture et de pisciculture. Le but est de produire à l’avenir des produits Bio transformés de la ferme et d’attirer des touristes pour faire de l’agro-tourisme.
Ma deuxième structure est Imagine le Monde à Gonzague près d’Abidjan. C’est une ONG qui soutient des familles vulnérables dans l’accès à l’éducation (très globalement). C’est une grande association avec plusieurs services :
– Le suivi scolaire
– Le service social
– Le centre polyvalent d’éducation et d’activité pédagogique
– Le centre de lecture et d’animation culturelle
– Le service communication
Il y a plein d’actions faites comme :
– L’alphabétisation des femmes
– Le parrainage d’enfants dans leurs scolarités, met en lien les parrains avec les enfants
– Le centre d’animation ouvert le mercredi après-midi à tous les enfants du quartier, qui participent à des activités
– Les sorties culturelles et sportives
– L’école spécialisée pour des enfants en situation de handicap
– La classe «coup de pouce» pour des enfants atteints de troubles de l’apprentissage
– Les colis alimentaires distribués
– Les fonds débloqués pour des problèmes de santé
– Les ateliers de couture pour autonomisation des femmes
3. Quelles ont été tes premières impressions ?
Ma première impression sur le Togo était bizarre car j’avais l’impression que ce qu’on racontait sur l’Afrique était vrai. Il y a des femmes qui portent des choses sur leurs têtes, il y a plein de vendeurs dans la rue, on reste coincé 3h sur une route car on est embourbé dans la terre, on mange beaucoup de piment, tout le monde porte des pagnes avec pleins de couleurs. J’avais l’impression d’être dans un documentaire au bout de monde.
Mes premières impressions sur la ferme c’était « Wha ! Comment je vais faire pour faire pipi la nuit pendant les 6 prochains mois (les toilettes étaient à l’autre bout de la ferme en plein milieu de rien) » et « Comment je vais faire pour me laver les cheveux avec un robinet et un sceau ». Je crois que ce sont des réactions normales quand il y a un gros choc culturel.
Quand nous sommes arrivées à Abidjan mes premières réactions étaient très différentes. Sur la route en sortant de l’Aéroport, je vois des gros buildings et plein de ponts, d’autoroutes et une circulation dense. Et je me dis cette fois « L’Afrique ce n’est pas seulement ce que j‘ai vu au Togo ». Puis on va manger dans un centre commercial et je me dis « mais je suis où ? » la clim est trop forte, j’ai froid et il y a plein de décorations de Noël. Avec la fatigue et le choc on avait l’impression avec Zoé d’être sur une autre planète.
4. Quelles ont été les petites choses culturelles qui t’ont étonnées ?
– Les gens qui font leurs besoins en pleine rue sans se cacher comme si c’était normal.
– Marcher des kilomètres sans se plaindre.
– Faire de la moto sans casque à trois.
– Manger du chien (au Togo) et du chat (en Côte d’Ivoire).
– Les histoires de sorcelleries toujours plus délirantes.
5. Quelles étaient tes missions ?
À Kailend Farm mes missions étaient d’aider dans les activités agricoles et de mettre en place une communication sur les réseaux sociaux. Créer du contenu vidéos et photos, embellir la ferme et la rendre plus accueillante.
Ma mission à Imagine le monde était de reprendre la gestion des activités du Centre de lecture et d’animation culturelle car un volontaire finissait sa mission quand nous sommes arrivées. Donc je préparais des activités sur le thème de la semaine, je notais les enfants présents et je faisais passer les informations entre la direction et l’équipe d’animateurs. J’organisais aussi des sorties potentielles le samedi en dehors de l’ONG ou des évènements spécifiques dans l’ONG (grand jeu, spectacle). Le reste de la semaine, le jeudi on préparait des activités patisseries avec les enfants du Cepeap (Centre polyvalent d’éducation et d’activité pédagogique). Et le vendredi on aidait Louise (une autre volontaire AIME) dans la gestion de la classe «Coup de pouce».
6. Quelles ont été les difficultés rencontrées et comment les as-tu surmontées ?
La plus grosse difficulté était lors de ma première mission à Kailend Farm. Je n’étais pas du tout épanouie dans ma mission et au quotidien, je me sentais très seule et pas bien entourée par mon tuteur. Je ne croyais plus dans le concept de la ferme donc je n’avais plus aucune motivation pour travailler. Les conditions de vie était trop difficile, attaquées par des puces les premiers jours, les toilettes sans chasse d’eau et la douche au sceau.
Mais ce qui me retenait c’était que c’était un dépassement de soi inimaginable et qu’on a donné beaucoup d’affection aux animaux. Les employés étaient très attachés à nous. Partir c’était un échec pour moi.
Nous sommes finalement parties et grâce à Mathilde nous avons pu trouver une deuxième structure d’accueil qui répondait à tous nos besoins sur le moment. C’était pas un échec, juste un deuxième départ.
7. Quel est ton meilleur souvenir ?
J’ai pas un meilleur souvenir…. Mais plein de petits souvenirs !
– Quand nous étions au Togo, on a acheté une moto et la première balade qu’on a fait dans les champs de cotons. J’avais l’impression d’être libre
– La victoire de la Côte d’Ivoire à la CAN, la joie du Foot
– Une journée à la plage qui s’est transformé en grosse tempête mais au lieu d’être affolé on dansait sous la pluie avec d’autres ivoiriens
8. Raconte-nous un projet pour lequel tu es fière ?
Je ne peux pas en choisir qu’un…
Le premier projet qui m’a rendu fière c’était la création d’un grand jeu un samedi. On avait quartier libre pour Mardi Gras, on devait organiser un événement avec 50 enfants et une entreprise partenaire sur le thème de Mardi Gras. On a décidé de faire un concours de comédie musicale avec des ateliers musique, costume, maquillage, danse puis à la fin une représentation. J’étais stressée mais tout s’est bien passé et les enfants ont adoré.
Ma deuxième fierté c’est mon appui au projet « coup de pouce » car j’ai construit un vrai lien avec certains enfants. Et c’est un accomplissement car aider des enfants qui ont des troubles de l’apprentissage alors que moi-même j’ai des troubles de l’apprentissage c’est une victoire. J’ai longtemps souffert du regard des autres sur mon orthographe, je n’avais pas confiance en moi dans ma scolarité. Je sais ce que sais, je comprends pourquoi ils réagissent comme ça et je suis contente de pouvoir les aider.
9. D’un point de vue global, que retiens-tu de cette expérience ?
Je retiens qu’on a beaucoup à apprendre des autres cultures. Je retiens qu’on a beaucoup à apprendre des autres. Je retiens que s’engager c’est beau et ça donne du sens à sa vie. Je retiens que ce n’est pas parce qu’une association à des bonnes intentions qu’elle fait que des bonnes choses. Je retiens qu’on a pas tous la chance d’aller à l’école, d’être libre, de manger à sa faim. On a jamais réellement conscience de ça si on a jamais voyagé. On le sait car on nous le dit en cours et on le voit dans des documentaires mais le voir en vrai c’est différent. On a des choses de base en France quand on naît avec des privilèges que d’autres n’ont pas.
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